À l’ère du numérique, la communication virtuelle est devenue omniprésente, représentant environ 70 % de nos interactions quotidiennes. Cependant, l’absence de signaux non verbaux traditionnels, tels que les expressions faciales et le langage corporel, peut entraîner des malentendus. Selon une étude publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology, le ton des courriels est mal interprété dans 50 % des cas. (Revue Gestion)
L’importance de la ponctuation et des émojis 😆
Dans le monde numérique, la ponctuation et les émojis jouent un rôle crucial pour transmettre des émotions et des intentions. Par exemple, l’utilisation excessive de points d’exclamation peut être perçue comme de la colère ou de l’impatience, tandis que l’absence totale de ponctuation peut rendre un message froid ou distant.
Les émojis, quant à eux, ajoutent une dimension humaine aux messages écrits, compensant l’absence de communication non verbale. Cependant, leur interprétation peut varier selon les cultures et les générations, ce qui nécessite une utilisation réfléchie pour éviter les malentendus. Il est important de noter que l’utilisation excessive d’émojis, surtout après des phrases potentiellement négatives, peut accentuer l’ironie ou le sarcasme, ce qui peut nuire à la communication.
Les équivalents numériques du langage corporel
Certaines actions en ligne peuvent être comparées à des gestes physiques. Par exemple, ignorer un message ou retarder une réponse peut être perçu comme l’équivalent numérique de croiser les bras ou d’éviter le regard, signalant potentiellement un désintérêt ou une réticence. De même, une réponse rapide et enthousiaste peut refléter une attitude ouverte et engageante.
Les lois du langage corporel numérique selon Erica Dhawan
Dans son ouvrage Digital Body Language, Erica Dhawan propose quatre principes pour améliorer la communication numérique, un livre très intéressant dont je vous partage ici mes notes de lecture et mes réflexions.
- Valoriser la visibilité :
Exprimez clairement vos intentions et montrez votre présence en ligne.
- Exemple : Répondre rapidement aux questions importantes et signaler quand un message a bien été reçu.
- Les signes non verbaux en présence sont invisibles en virtuel : il est donc essentiel de faire un effort pour exprimer votre approbation ou votre accord, comme vous hocheriez la tête en personne.
- Lire attentivement un message est l’équivalent numérique d’écouter activement.
- Ignorer une requête virtuelle revient à éviter du regard une personne dans une pièce physique.
- Relire avant d’envoyer un message est essentiel pour s’assurer de sa clarté et de son ton approprié.
- Honorer le temps qui nous est accordé en répondant dans un délai raisonnable témoigne de respect et d’engagement.
- Communiquer avec soin :
Choisissez le bon canal pour chaque message et soyez conscient de l’impact de vos mots et de votre ponctuation.
- Exemple : Préférer un appel vidéo pour des discussions sensibles et un courriel structuré pour des suivis clairs.
- Minimiser le risque de malentendu en formulant vos messages de manière explicite.
- Choisir le bon canal pour un message : un courriel pour des échanges formels, un chat pour des questions rapides.
- Être attentif à qui vous adressez un message (et à qui vous mettez en copie) pour éviter des redondances ou des malentendus.
- S’assurer que les bonnes personnes sont impliquées dans les échanges pour éviter les surprises ou les tâches en double.
- Éviter le multitâche en étant sur « mute » lors des rencontres montre que vous accordez toute votre attention.
- Être clair lorsqu’on sollicite quelqu’un facilite la compréhension et accélère la réponse.
- Privilégier les questions ouvertes plutôt que les affirmations indirectes.
- Relire attentivement les messages avant de les envoyer, en se mettant à la place du destinataire.
- Collaborer avec confiance :
Respectez les délais et les engagements, et assurez-vous que tous les membres de l’équipe se sentent inclus.- Exemple : Mentionner explicitement les contributions de chacun et clarifier les attentes dans un projet.
- Faire confiance pleinement : Créez un environnement où chacun se sent écouté et valorisé, favorisant ainsi une culture de confiance.
- Exemple : Encourager les retours honnêtes et reconnaître les efforts collectifs.
- Respecter, c’est accorder du temps et de l’effort pour s’assurer qu’un remerciement virtuel est communiqué de la façon la plus honnête et authentique possible.
- L’importance de la vidéo lors de réunion :
- Le fait de voir les autres participants permet de mieux voir les réactions des autres participants.
- Cela permet de garder l’attention de tous les participants.
- Formes passives-agressives dans la communication numérique
Certaines pratiques numériques peuvent sembler passives-agressives et nuire aux relations professionnelles :- Répondre avec des messages brefs ou vagues comme « Noté » ou « OK » peut paraître froid ou condescendant.
- Ignorer un message ou répondre après un délai excessif sans explication peut être perçu comme un manque de respect.
- Utiliser des formulations ambiguës comme « Je pensais que c’était évident » peut donner l’impression de critiquer indirectement.
- « Corrige moi si j’ai tord mais… » : Cette phrase, bien qu’apparemment ouverte à la correction, peut souvent cacher une certitude déguisée et une volonté de pointer subtilement une erreur.
- « Tel que mentionné dans mon email précédent » : Utilisée de manière répétée, cette formule peut donner l’impression de reprocher à l’interlocuteur de ne pas avoir prêté attention, surtout si l’information était noyée dans un long courriel.
- « Juste pour réitérer (et copier un passage précédent en gras) » : Le gras peut être perçu comme une façon d’insister de manière excessive, voire condescendante, sur un point.
- « Je ne suis pas sur que mon précédent courriel s’est rendu alors… » : Cette phrase peut sous-entendre un doute sur la compétence de l’interlocuteur à gérer sa boîte de réception.
- « Pour références futures » : Cette phrase peut être perçue comme arrogante, comme si on supposait que l’interlocuteur aurais besoin de ce genre de référence.
- « Dorénavant » : Cette phrase peut faire penser à une sorte de menace, et indiquer un changement dans la relation.
- N’importe quelle de ces formules suivies de plein d’émojis : L’utilisation excessive d’émojis après une phrase potentiellement agressive peut accentuer l’ironie ou le sarcasme, rendant le message encore plus ambigu.
- La ligne est parfois mince entre politesse et passif-agressif, surtout selon le niveau d’autorité : Il est crucial de reconnaître que le contexte hiérarchique influence grandement la perception de ces formulations. Ce qui peut être considéré comme une simple remarque entre collègues peut être interprété comme une forme d’autorité mal placée de la part d’un supérieur.
Quand la forme blesse : les impacts sur le climat de travail
Ces micro-tensions numériques, souvent perçues comme de simples maladresses ou choix de mots malheureux, peuvent en réalité éroder peu à peu la qualité des relations professionnelles. Une communication perçue comme froide, ambiguë ou autoritaire nuit à la sécurité psychologique des équipes : les gens hésitent à s’exprimer, à poser des questions ou à prendre des initiatives. À l’inverse, une communication claire, empathique et respectueuse crée un climat de confiance, où la collaboration devient plus fluide et où les malentendus sont plus vite dissipés. Il ne s’agit pas seulement de « bien écrire » : il s’agit de prendre soin de la relation, même (et surtout) à distance.
- L’anxiété du timing : un facteur de stress numérique croissant
L’ère numérique a introduit une nouvelle forme de stress : l’anxiété du timing. Elle se manifeste par une inquiétude constante quant au moment opportun pour agir dans les interactions en ligne.- Par exemple, l’ordre dans lequel on est inséré dans une liste de destinataires en copie (CC) peut être interprété comme un indicateur de son importance ou de son niveau d’implication. De même, l’ordre d’arrivée dans une réunion virtuelle peut susciter des interrogations sur sa ponctualité ou son engagement.
- L’ordre dans lequel les participants raccrochent lors d’une visioconférence peut également être sujet à interprétation, certains pouvant se sentir négligés s’ils sont les derniers à quitter.
- Cette anxiété du timing souligne l’importance de la conscience et de la sensibilité dans les interactions numériques, où le moindre détail peut être interprété comme un signal, souvent à tort.
- Délais de réponse acceptables
La rapidité de réponse influence la perception de l’engagement et du respect, mais elle est également devenue une source d’anxiété dans le monde numérique.- L’évolution des attentes :
- Les attentes en matière de rapidité de réponse ont considérablement évolué. Alors qu’auparavant, plusieurs heures étaient considérées comme acceptables, l’absence de réponse après quelques minutes peut parfois générer de l’anxiété.
- Variabilité des délais :
- Les délais de réponse acceptables varient considérablement en fonction de plusieurs facteurs :
- La personne : Certaines personnes sont plus enclines à répondre rapidement que d’autres.
- Le canal : Les messages instantanés (chat, SMS…)
- Le contexte : Les demandes urgentes nécessitent une réponse immédiate, tandis que les demandes moins urgentes peuvent attendre.
- Les délais de réponse acceptables varient considérablement en fonction de plusieurs facteurs :
- L’évolution des attentes :
- Réponse efficace :
- Il est préférable de répondre dès que possible, surtout si vous êtes en mesure de traiter la demande immédiatement.
- Si vous ne pouvez pas traiter la demande immédiatement, accusez réception du message et indiquez clairement quand vous serez en mesure de fournir une réponse complète.
Solutions pour une communication numérique efficace
- Comment faire de l’écoute active dans une conversation numérique ?
- Répondre rapidement, même si la réponse est qu’on va y répondre plus tard.
- Répondre à tous les points dans les courriels, pas seulement un ou deux.
- Demander des rencontres vidéos pour les points plus complexes qui prendraient trop de temps à l’écrit.
- Ne pas interrompre.
- Utiliser des signaux comme « Vas-y », « j’écoute », « à ton tour… » pour encourager les autres à participer.
- Ne pas utiliser le bouton mute comme une permission de faire du multitâche.
- Poser des questions pour clarifier.
- Prendre des notes (et les partager).
- Varier les rencontres en encourageant les gens à écrire leurs réponses dans le chat pour lancer une discussion.
- Un appel téléphonique vaut 20 courriels (ou 50, 100, 1000…).
- Comment connecter avec les introvertis ?
- Découper les longs meetings en parties.
- Attendre au moins 5 secondes après une question.
- Envoyer les questions quelques jours avant la rencontre pour qu’ils s’y préparent.
- Encourager les réponses par courriel autant que verbales.
- Varier le type d’intervention et de possibilités de réponse (verbal, sondage, chat, etc.).
- Ne jamais interrompre. Utiliser les outils de main levée et modérateur pour respecter les droits de parole.
- Comment connecter avec les extravertis ?
- Organiser des rencontres face à face pour leur donner la chance de parler.
- Utiliser des « breakout groups » pour les laisser parler en petits groupes avant d’amener leurs idées au grand groupe.
- Assurer des « water-cooler spaces » pour stimuler les échanges hors réunion.
- Respect et clarté :
- Commencer chaque réunion par une présentation des indices de succès de la rencontre, des points traités, le temps alloué et les participants.
- Dire pourquoi chaque participant a été invité en les présentant.
- Commencer et terminer les rencontres selon l’horaire promis.
- 8 est le maximum gérable pour une rencontre de groupe.
- Indiquer lorsqu’une participation est optionnelle.
- Conseils pour une communication directe et efficace :
- Si vous êtes tenté d’écrire une phrase passive-agressive, prenez le temps de vous calmer et répondez plus tard.
- Supposer une bonne intention et donner à la personne le bénéfice du doute.
- Communiquer avec empathie et encouragement.
- Ne pas « ghoster » quelqu’un ou le laisser en suspens.
- Si le suivi par e-mail ne fonctionne pas, appelez.
- La culture et les générations :
- Il existe des expressions et des structures de phrase spécifiques à chaque culture.
- Les émotions et les gestes peuvent avoir des significations différentes selon les cultures (ex : mains jointes).
- Les nouvelles générations ont une relation différente avec la technologie (ex : perception des appels téléphoniques).
- La communication entre différentes générations exige des ajustements mutuels (émotions, canaux, ton, formulation, vocabulaire, abréviations, formules de politesse…).
En conclusion
Maîtriser le langage corporel numérique est essentiel pour éviter les malentendus et favoriser une communication claire et respectueuse. En étant attentif aux nuances, en choisissant le bon canal et en valorisant la transparence, vous pouvez créer un environnement de travail virtuel plus collaboratif et inclusif. Comme le souligne Erica Dhawan, chaque interaction numérique est une occasion de renforcer la confiance et la connexion humaine, même à distance. Il est important de se rappeler que, même dans le monde numérique, la communication reste une question de connexion humaine. En mettant en pratique les conseils et les solutions présentés, nous pouvons tous contribuer à une communication numérique plus efficace, respectueuse et humaine.








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